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Page:Le conseiller des femmes, 7 - 1833.pdf/7

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d’une bien longue enfance : maintenant nous songeons à préparer pour les femmes à venir une ère nouvelle et meilleure ; car pour nous subsiste encore en partie ce qui a toujours subsisté, et comme, ici, il ne s’agit point de vaincre la force par la force, mais de fonder avant que de détruire, il est probable qu’aucune de nous ne verra le complément des changemens déjà amenés par le temps : de ces changemens qui ont eu lieu sans la participation volontaire de l’homme.

L’émancipation que nous réclamons n’est point une folie, une chimère ; nous n’avons point la prétention de vouloir nous délivrer de ces chaînes qu’impose à la femme la nature surtout ; le savoir ne pourrait nous dédommager de toutes les jouissances qu’il fait perdre à l’homme ; la liberté entière dont il s’énorgueillit, ne saurait nous satisfaire, car pour être libre de cette manière il faut rompre les liens de famille, vivre de sa propre vie, et de l’égoïsme de la femme est toujours à deux[1] ; mais nous osons dire qu’au nombre des préjugés qu’il reste encore à abolir, ceux qui sont relatifs à la femme se trouvent presque tous debout ; qu’il est temps d’attester dans les lois, que la mère aussi bien que le père, et même si ce n’est mieux, peut être la dépositaire de la fortune et de l’avenir de ses enfans, et que si la raison acquise est le partage de l’homme, la raison native est le nôtre.

C’est à nous, femmes, de prouver nos droits ; c’est à nous de répandre parmi les femmes l’instruction, qui nous devient à toutes chaque jour nécessaire ; car, seules, nous pouvons faire marcher avec elle l’éducation, et seules nous saurons ne point sacrifier l’une à l’autre.

  1. Mad. de Staël