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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 10, trad Mardrus, 1902.djvu/200

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les mille nuits et une nuit

dit : « Non, par Allah ! je ne rêve pas ! Me voici devenu khalifat ! » Mais il hésita encore ; et dit à haute voix : « Par Allah ! tout cela est le fait de ma raison égarée par toute la boisson que j’ai bue hier avec le marchand de Mossoul, et aussi l’effet de ma folle conversation avec lui ! » Et il se tourna du côté du mur pour se rendormir. Et, comme il ne bougeait plus, Giafar s’approcha encore de lui et lui dit : « Ô émir des Croyants, permets à ton esclave de s’étonner de voir son seigneur manquer à son habitude de se lever pour la prière ! » Et, au même moment, sur un signe de Giafar, les joueuses d’instruments firent entendre un concert de harpes, de luths et de guitares, et les voix des chanteuses retentirent harmonieusement. Et Aboul-Hassân se retourna du côté des chanteuses, en se disant à haute voix : « Et depuis quand, ya Aboul-Hassân, les dormeurs entendent-ils ce que tu entends et voient-ils ce que tu vois ? » Et il se leva sur son séant, à la limite de la stupéfaction et de l’enchantement, mais doutant toujours de la réalité de tout cela. Et il se mit les mains devant les yeux pour mieux distinguer et se mieux prouver ses impressions, et en se disant : « Ouallah ! N’est-ce pas étrange ? N’est-ce pas stupéfiant ! Où es-tu donc, Aboul-Hassân, ô fils de ta mère ? Rêves-tu ou ne rêves-tu pas ? Depuis quand es-tu le khalifat ? Depuis quand ce palais, ce lit, ces dignitaires, ces eunuques, ces femmes charmantes, ces joueuses d’instruments, ces chanteuses enchanteresses, et tout ceci, et tout cela ? » Mais, à ce moment, le concert cessa, et Massrour, le porte-glaive, s’approcha du lit, baisa la terre à trois re-