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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 10, trad Mardrus, 1902.djvu/204

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les mille nuits et une nuit

« Qu’Allah rende victorieux le khalifat ! » Et Aboul-Hassân pensait : « Par Allah ! n’est-ce pas une chose merveilleuse ? Hier j’étais Aboul-Hassân ! Et aujourd’hui je suis Haroun Al-Rachid ? « Puis il se dit : « Du moment que c’est l’heure d’aller pisser, allons pisser ! Mais je ne suis pas bien sûr maintenant si c’est bien l’heure aussi où je satisfais l’autre besoin, également ! » Mais il fut tiré de ces réflexions par le chef eunuque qui lui tendit une paire de chaussures découvertes brodées d’or et de perles, et qui, hautes de talon, étaient spécialement réservées pour être chaussées au cabinet. Mais Aboul-Hassân, qui, de sa vie, n’avait vu pareille chose, prit les chaussures et, croyant que c’était quelque objet précieux dont on lui faisait cadeau, les mit dans l’une des larges manches de sa robe !

À cette vue, les assistants, qui jusque-là avaient réussi à retenir leurs rires, ne purent plus longtemps comprimer leur hilarité. Et les uns tournèrent la tête, tandis que les autres, faisant semblant d’embrasser la terre devant la majesté du khalifat, tombèrent sur les tapis, convulsés. Et, derrière le rideau, le khalifat était pris d’un tel rire silencieux, qu’il était sur le flanc, étendu sur le sol.

Pendant ce temps, le chef eunuque, soutenant Aboul-Hassân par-dessous l’épaule, le conduisit à un cabinet pavé de marbre blanc, alors que toutes les autres pièces du palais étaient couvertes de riches tapis. Après quoi, il le ramena dans la chambre à coucher, au milieu des dignitaires et des dames, tous rangés sur deux files. Et aussitôt d’autres esclaves s’avancèrent, qui étaient spécialement chargés de