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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 10, trad Mardrus, 1902.djvu/243

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histoire du dormeur éveillé
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manqua pas de lui expliquer, vu que son esprit à elle n’aurait pu tout seul arriver à cette compréhension, que c’était le khalifat lui-même qui lui avait joué tous ces tours, simplement pour se divertir. Et il ajouta : « Mais puisque tout a fini par tourner à mon avantage, qu’Allah le Bienfaiteur soit glorifié ! » Puis il se hâta de la quitter, en lui promettant qu’il reviendrait la voir tous les jours, et reprit le chemin du palais, tandis que le bruit de son aventure avec le khalifat et de sa situation nouvelle se répandait dans tout le quartier, et de là à travers tout Baghdad, pour ensuite gagner les provinces proches et reculées.

Quant à Aboul-Hassân, la faveur dont il jouissait auprès du khalifat, au lieu de le rendre arrogant ou désagréable, ne fit qu’exalter sa bonne humeur, son caractère jovial et sa gaieté. Et il ne se passait pas de jour où il ne divertit le khalifat et toutes les personnes du palais, les grands et les petits, par ses saillies pleines d’esprit et ses plaisanteries. Et le khalifat, qui ne pouvait plus se passer de sa société, le menait partout avec lui, même dans les appartements réservés, et chez son épouse, Sett Zobéida : ce qui était une faveur que jamais il n’avait accordée, même à son grand-vizir Giafar.

Or Sett Zobéida ne tarda pas à remarquer qu’Aboul-Hassân, chaque fois qu’il se trouvait avec le khalifat dans l’appartement des femmes, s’obstinait à fixer les yeux sur une de ses suivantes, celle précisément qui s’appelait Canne-à-Sucre, et que la petite, sous les regards d’Aboul-Hassân, devenait toute rouge de plaisir. C’est pourquoi elle dit un jour à son époux : « Ô émir des Croyants, sans