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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 10, trad Mardrus, 1902.djvu/244

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les mille nuits et une nuit

doute que tu as remarqué, comme moi, les signes péremptoires d’amour qu’échangent Aboul-Hassân et la petite Canne-à-Sucre. Que penses-tu donc d’un mariage entre eux ? » Il répondit : « Cela se peut. Et je n’y vois pas d’inconvénient. J’aurais dû d’ailleurs y penser moi-même depuis longtemps. Mais les affaires du règne m’ont fait oublier ce soin-là. Et j’en suis fort contrarié, car j’avais promis à Aboul-Hassân, lors de la seconde soirée dans sa maison, de lui trouver une épouse de choix. Or je vois que Canne-à-Sucre fera bien l’affaire. Et nous n’avons plus qu’à les interroger tous deux pour voir si le mariage est à leur goût. »

Aussitôt ils firent venir Aboul-Hassân et Canne-à-Sucre, et leur demandèrent s’ils consentaient à se marier ensemble. Et Canne-à-Sucre, pour toute réponse, se contenta de rougir à l’extrême, et se jeta aux pieds de Sett Zobéida, en lui baisant le pan de sa robe, en signe de remercîment. Mais Aboul-Hassân répondit : « Certes, ô émir des Croyants, ton esclave Aboul-Hassân est le noyé de ta générosité. Mais avant de prendre chez lui, comme épouse, cette charmante jouvencelle dont le nom seul peint déjà les exquises qualités, je voudrais, avec ta permission, que notre maîtresse Sett Zobéida lui posât une question… » Et Sett Zobéida sourit et dit : « Et quelle est cette question, ô Aboul-Hassân ? » Il répondit : « Ô ma maîtresse, je voudrais savoir si mon épouse aime ce que j’aime. Or, moi, je dois te l’avouer, ô ma maîtresse, les seules choses que j’estime, sont la gaieté par le vin, le plaisir par les mets et la joie par le chant et les beaux vers ! Si