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les mille nuits et une nuit

dans cet état d’affliction un très grand espace de temps. Mais, un jour d’entre les jours, pendant qu’il était assis tristement, il entendit quelqu’un frapper à la porte, et il se leva ouvrir lui-même et vit entrer un jeune homme de son âge, fils d’un des anciens amis et convives de feu son père le vizir ; ce jeune homme baisa la main d’Ali-Nour et lui dit : « Mon maître, tout homme vit dans ses descendants, et un fils comme toi ne peut qu’être le fils illustre de son père ! Il ne faut donc pas éternellement l’affliger, et n’oublie pas les saintes paroles du Seigneur des Anciens et des Modernes, notre Prophète Mohammad (que sur lui soient la prière et la paix d’Allah !) qui a dit : « Guéris ton âme et ne porte point le deuil de la créature ! »

À ces paroles Ali-Nour ne put rien trouver à redire ; et aussitôt il résolut de mettre un terme à son affliction, du moins extérieurement. Il se leva, se transporta dans la salle de réunion et y fit transporter tous les objets obligatoires pour dignement recevoir les visiteurs. Et dès ce moment il ouvrit les portes de sa maison et commença à recevoir tous ses amis, jeunes et vieux. Mais il s’attacha particulièrement à dix jeunes gens, fils des principaux marchands de Bassra. Et, en leur compagnie, Ali-Nour commença à passer le temps en réjouissances et en festins continuels ; et il n’était personne à qui il ne fît cadeau de quelque objet de prix ; et il ne recevait personne sans qu’aussitôt il ne donnât une fête en son honneur. Et il faisait tout cela avec une telle prodigalité, malgré les sages remontrances de Douce-Amie, qu’un jour son intendant,