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Page:Le mécanisme du toucher, Marie Jaëll.pdf/85

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dissement de la pensée se manifeste chez les exécutants qui attribuent de grandes dimensions à leurs mouvements et au clavier. C’est l’exécutant auquel le clavier paraît petit dont la pensée, le sentiment musical, aura le plus d’essor ; au point de vue de l’interprétation d’une œuvre, sa conception s’élargira en raison de l’amoindrissement de ses représentations des intervalles, quelques dimensions qu’auraient en réalité ses mouvements. Souvent le phénomène de rapetissement des dimensions devient plus frappant à mesure que les mouvements réalisés sont plus étendus.

Si le caractère des contacts peut exercer une telle influence sur l’exécution, c’est que l’agencement des mouvements forme le complément inséparable de l’agencement physiologique des contacts. Les contacts bien agencés nous permettent d’orienter les mouvements en des directions opposées ou complémentaires. L’agencement si aisé de cette interversion ferait supposer qu’il y a une analogie entre ce phénomène fonctionnel et le phénomène visuel en vertu duquel si, « après avoir considéré longtemps une surface en mouvement comme une nappe d’eau coulant avec rapidité, l’on porte les yeux sur un objet immobile, une illusion constante nous le fait voir animé d’un mouvement qui l’entraîne en sens inverse du courant[1] ».

La même tendance se manifeste dans l’exécution où les mouvements inverses semblent s’agencer par l’utili-

  1. Leuret et Gratiolet, Anatomie comparée du système nerveux.