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L’ENTHOUSIASME

me ruant au besoin sur la plus mince occasion, la pressurant, la raclant, en exprimant jusqu’à la dernière goutte de joie. Claire a dû chercher. Les peines l’ont assaillie, le destin l’a torturée, elle a connu l’injustice, la haine, le mépris, la fureur : rien ne l’a rebutée. Elle a cherché obstinément et, quand elle eût trouvé, sa vie s’établit d’elle-même sur des bases aussi inébranlables que le permet la condition humaine.

Il est aisé d’être heureux, pour qui se contente d’un petit bonheur ou d’un bonheur inconscient, plutôt physique. Mais à celui qui veut être heureux noblement, purement, sans concessions, autant avec sa raison qu’avec son cœur et sa chair, avec sa pensée comme avec ses instincts, à celui-là il faut une grande force, un courage invincible, une foi superbe, et une âme « effrontée » qui regarde la douleur en face, droit dans les yeux.

Dès qu’il me fut possible de revoir Geneviève, je la priai de déchirer, sans en faire usage, la lettre que je lui avais remise.