Page:Leconte de Lisle - Poëmes antiques, 1852.djvu/295

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Chansons de l’hydriade au sein des eaux courantes ;
Et formant, sans remords, le tissu de mes jours
De force et de sagesse et de chastes amours.
Tel j’étais, fils d’Œagre, en ma saison superbe !
Je buvais l’eau du ciel et je dormais sur l’herbe,
Et parfois, à l’abri des bois mystérieux,
Comme fait un ami, j’entretenais les dieux !

En ce temps, sur l’Ossa ceint d’éclatants orages
J’errais, et sous mes pieds flottaient les lourds nuages,
Quand au large horizon par ma vue embrassé,
Où sommeille Borée en son antre glacé,
Je vis, couvrant les monts et noircissant les plaines,
Attiédissant les airs d’innombrables haleines,
Incessant, et pareil aux épais bataillons
Des avides fourmis dans le creux des sillons,