Page:Lefèvre-Deumier - Confidences, 1833.djvu/375

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Malgré mon front pensif, mon âme était limpide,
Et comme dans un lac, dont la gaze fluide
Ne laisse apercevoir, sous son voile argenté,
Que les saphirs nageurs du Lotus abrité,
Je pouvais regarder au fond de ma mémoire,
Sans y voir un chagrin. Mille formes de gloire,
Comme la flammerole, errante au bord des eaux,
Éclairaient, en volant, mon volage repos.
J’habitais dès ce monde un intime Elysée,
Où des illusions la splendide rosée
De ses perles de feu liserait mon jardin,
Et là, crédule abeille, éclose du matin,
Sur des fleurs, dont mon souffle enfantait des prodiges,
Je cueillais, enivré, le miel de mes prestiges. r h
Abreuvé de trésors, -j’en inventais toujours :
Aucun génie encor n’avait vu, dans ses jours,
Eclater, à la fois, tant de gerbes d’images :
J’errais dans les combats, j’épuisais les voyages,
Et puis je revenais, jeune encore et joyeux,
Jeter ma dernière ancre au sol de mes aïeux.