Page:Legouvé - Soixante ans de souvenirs, 1886.djvu/660

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Chénier, un auteur dramatique, et pour marraine Mme Vestris, une tragédienne. Il fit ses classes à la fois au collège de Navarre et dans les coulisses de la Comédie-Française. Il vécut, il grandit, entre Talma, Fleury, Molé, Mlle Contat. Pendant douze ans, il n’y eut pas un grand succès sur la scène française qui ne fît écho dans cette tête d’enfant. Ne semble-t-il pas qu’il ait été prédestiné à l’emploi de conseiller dramatique ? Mais ce qui le caractérise, c’est qu’il y porta tout ensemble son goût de dilettante, et son esprit méthodique et précis d’administrateur.

Mahérault était l’antithèse de Germain. Germain n’écrivait jamais son avis, Mahérault l’écrivait toujours. La brièveté était le propre des jugements de Germain ; sa paresse s’accommodait de sa concision, et un mot suffisait à sa finesse. Mahérault ne se contentait ni d’une seule audition pour se faire une opinion, ni d’une seule ligne pour l’exprimer.

Scribe le savait bien, et sa pièce finie, lue, il la lui donnait.

Alors commençait le véritable conseil de Mahérault, le conseil, la plume à la main.

J’ai là, sous les yeux, une liasse de papier portant pour titre : « Observations faites par moi à Scribe, sur ses pièces, avant la représentation. »

Il ne s’agit pas moins que d’analyses contenant chacune dix pages, douze pages ; j’en ai vu une de vingt-cinq pages.

Malérault suit l’ouvrage acte par acte, scène par scène, personnage par personnage, presque ligne par