Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/122

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

turelle » à l’homme, qu’elle est conforme à la « nature », donc respectable. Jean-Jacques ne se fait pas cette objection, et poursuit intrépidement :

Il serait triste pour nous d’être forcés de convenir que cette faculté distinctive et presque illimitée est la source de tous les malheurs de l’homme ; que c’est elle qui le tire, à force de temps, de cette condition originaire dans laquelle il coulait des jours tranquilles et innocents.

(Qu’en sait-il ?) Mais ce n’est pas tout, et il n’a pas encore épuisé son facile paradoxe. Il se demande comment l’homme a pu tant progresser. Il répond : — Par la parole. Mais comment l’homme a-t-il inventé la parole ? — On ne sait pas. Il est presque impossible de s’en rendre compte. Rousseau écrit ici, sur l’origine du langage, quelques pages que je trouve excellentes. Mais écoutez sa conclusion :

On voit du moins, au peu de soin qu’a pris la nature de rapprocher les hommes par des besoins mutuels et de leur faciliter l’usage de la parole, combien elle a peu préparé leur sociabilité et combien elle a peu mis du sien pour en établir les liens.

Autrement dit : — L’homme, en inventant le langage, a été contre le voeu de la nature ; et la preuve, c’est que cette invention lui a donné un mal de tous les diables. — Ainsi, après avoir regretté, dans le premier Discours l’invention de