Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/136

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choses dont ils jouissent qu’autant que les autres en sont privés et que, sans changer d’état, ils cesseraient d’être heureux, si le peuple cessait d’être misérable…

Sur les tyrans :

…C’est du sein de ce désordre et de ces révolutions que le despotisme, élevant par degrés sa tête hideuse, et dévorant tout ce qu’il aurait aperçu de bon et de sain dans toutes les parties de l’État, parviendrait enfin à fouler aux pieds les lois et le peuple, et à s’établir sur les ruines de la république…

Et enfin il y a, partout répandu dans ces pages d’où est absent « l’esprit de finesse », ce culte stupide de l’égalité que nous retrouverons dans le Contrat social, et qui porte en lui une grande force de propagande parce qu’il répond moins au sentiment de la justice qu’aux instincts envieux. — En somme, on voit déjà dans ce second Discours (et mieux que dans le premier) que c’est bien Rousseau qui donnera le ton à la Révolution et qui approvisionnera les hommes de 93 de clichés et de lieux-communs, semeurs de haines aussi aveugles que ces lieux-communs sont brutaux et sommaires.

Cette fois, l’Académie de Dijon ne couronna pas le discours de Rousseau. Si « éclairée » qu’elle fût, ce n’est pas ce discours qu’elle avait espéré.

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Les années qui suivent sont, je pense, parmi les moins malheureuses de la vie de Jean-Jacques. Il jouit de se sentir si bon, — et célèbre par-dessus le marché. Il se souvient de sa petite patrie, de