Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/281

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dangereux même d’aspirer à un idéal de cette louche espèce-là. « Idéal, idéal », cela est bientôt dit, et ce n’est pas du tout synonyme de bon, de généreux ou d’utile.

Enfin, voilà le fait, Rousseau, même dans le Contrat, avoue que le gouvernement du Contrat est absolument inapplicable. Et il le confessera encore mieux, un peu plus tard, dans ses lettres.

Nous sommes habitués à ces palinodies. Nous l’avons toujours vu atténuer ou même démentir dans sa correspondance les paradoxes trop agressifs ou trop déraisonnables qu’il avait mis dans ses livres. — En outre, il devait être d’autant plus disposé à renier le Contrat, que, tout de même et quoi qu’on ait fait pour l’y rattacher, le Contrat est en assez vif désaccord avec ses autres ouvrages.[1] (Dans ceux-ci il a coutume d’accorder le moins possible à l’institution sociale ; dans celui-là, il livre à l’institution sociale l’homme tout entier.) — Enfin, quelques années ont passé. Ces Genevois, pour qui surtout il avait écrit son livre, l’ont odieusement persécuté. C’est le moment où il écrit au Corse Butta-Foco :

J’aime naturellement autant votre clergé (le clergé catholique), que je hais le nôtre. J’ai beaucoup d’amis parmi le clergé de France, et j’ai toujours très bien vécu avec eux.

  1. Il ne faut pas oublier que la rédaction primitive du Contrat social est antérieure au premier Discours de Rousseau et à sa théorie de la bonté de la nature.