Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/341

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Livrons-nous tout entier, dit-il, à la douceur de converser avec mon âme, puisqu’elle est la seule (cette douceur) que les hommes ne puissent m’ôter.

J’ai déjà, au cours de mes leçons, puisé plusieurs fois dans les Rêveries. On y trouve, plus encore que dans les Dialogues, un détachement parfait, l’abandon total à Dieu :

Tout est fini pour moi sur la terre. On ne peut plus m’y faire ni bien ni mal… et m’y voilà tranquille au fond de l’abîme, pauvre infortuné, mais impassible comme Dieu même.

« Comme Dieu même ? » Réveil d’orgueil. Quand sera-t-il humble ? Ne saura-t-il jamais que l’humilité n’est pas seulement la plus religieuse, mais aussi la plus philosophique des vertus ? Se résigner à n’être que le peu qu’on est, et craindre de surfaire ce peu, n’est-ce point l’achèvement de la sagesse ?

Il est sur la voie pourtant… Il est moins indulgent pour lui-même. — Proche de la mort, — des fautes qui lui reviennent du fond de son passé, il en retient deux seulement : et nous connaissons à cela que ce sont à ses yeux ses deux plus grandes fautes, ses deux remords. C’est d’abord l’abandon de ses enfants, — et c’est aussi, — cinquante ans après, — le mensonge par lequel il accusa la pauvre Marion d’avoir volé le ruban…

Et là-dessus vient une dissertation pénétrante et stricte sur le mensonge, comme d’un pénitent