Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/97

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Esclaves, l’Ile de la Raison), et ne tirait pas autrement à conséquence.

(Aujourd’hui, que nous sommes quelques milliers d’auteurs, dont deux ou trois cents célèbres, il est clair qu’un morceau comme le premier Discours de Jean-Jacques passerait totalement inaperçu. — La question, d’ailleurs, que Jean-Jacques y résout si facilement ressemble à ces questions banales, inutiles et insolubles que les « reporters » posent aux écrivains, justement parce qu’elles prêtent à un bavardage indéfini.)

Mais, si le lieu-commun est banal, on pouvait l’illustrer de peintures précises et assez probantes, car le temps y prêtait ; et peut-être n’avait-on pas encore vu la haute société aussi pervertie, sinon par les « sciences et les arts », du moins par les raffinements de l’esprit et par une culture trop tournée vers le seul agrément.

Ce que Rousseau omet de faire, Duclos le fait, exactement à la même époque, avec beaucoup de sagacité et quelque vigueur dans ses Considérations sur les moeurs (1751). D’abord Duclos distingue Paris et la province et, dans Paris même, il considère seulement quelques groupes. Et Duclos saisit et définit fort bien les vices ou défauts caractéristiques de cette société restreinte : non pas tant encore le dérèglement des mœurs (dont je ne pense pas que Rousseau se crût exempt) que la vanité, la frivolité, l’abus de l’esprit, le « persiflage » (ce que nous appelons aujourd’hui la