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GUSTAVE RIVET.

 
Et tous les deux, muets, calmes, rêveurs, heureux,
Egarés par les champs, loin des chemins poudreux,
Les pieds dans les gazons, l’œil dans le ciel d’opale,
Nous attendrons l’éveil de l’aube matinale.

(Voix perdues)

RÊVERIE D’AUTOMNE

Je veux aller m’asseoir parmi les herbes folles
Que jaunit le soleil des Midis, et qui font
Ces longs chuchotements dont les vagues paroles
Ravissent nos esprits à l’extase sans fond.

Je veux aller, pensif, le cœur plein d’harmonies,
Sous les ormeaux épais aux murmures berceurs,
Et je veux respirer les douceurs infinies
De l’air des champs, chargé de ses vertes senteurs.

Je veux fouler aux pieds le frais tapis de mousse,
Et, dans la solitude où le vulgaire a peur,
J’écouterai vibrer la note triste et douce
Du chant intérieur que soupire mon cœur ;

Et, regardant au ciel les chaudes lueurs roses
Qu’étale à l’Occident le soleil descendu,
Bien loin du tourbillon des hommes et des choses,
Dans un monde plus beau je me croirai perdu.

C’est alors que mon âme, où la grande nature
Met la sérénité de son ciel calme et doux,
Vers l’idéal sacré s’élèvera plus pure,
Et se recueillera pour mieux songer à vous.


(Voix perdues)