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FRÉDÉRIC PLESSI.

 
Comment de longs yeux noirs, une bouche de rose
Ont ému de désir mon âme à peine éclose,
Et comment je n’ai pu me convaincre, un seul jour,
Que tout autre bonheur vaille un baiser d’amour !



MYSTICISME


En vain du dernier culte on dévoile la feinte.
Par un instinct rebelle aux plus hautains discours,
D’un monde où l’âme habite et revit pour toujours,
Tu nourris en ton cœur l’espérance ou la crainte.

Les uns veulent surprendre en cette éternité,
Comme en un sanctuaire aux portes longtemps closes,
L’âme de la nature et le secret des choses ;
Mais tu n’es pas séduit par tant de vanité.

D’autres se laissent prendre au désir de connaître
Le Dieu mystérieux qui créa sans remord
La mort, et la douleur plus sombre que la mort :
Mais ta raison plutôt s’étonne d’un tel maître.

Tu verrais sans effroi le noir tombeau s’ouvrir
Et se clore à jamais sur ta triste pensée,
Sur ton esprit plus las que ta chair n’est lassée...
Mais ton cœur ! c’est ton cœur qui ne veut pas mourir.

La vierge que ton rêve a toujours poursuivie
Et qui, sans le savoir, a changé ton destin,
Tu veux l’aimer encore en ce monde incertain
Où la voix des aïeux vaguement nous convie.