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derrière les vieux murs en ruines

plus grossières créatures que j’aie rencontrées ; leurs conversations feraient rougir un eunuque !

Elles m’entourent, me tripotent, m’examinent, tâtent mes vêtements, évaluent mes bijoux, s’enquièrent du prix de tout ce que je porte, soulèvent mes jupes, me posent des questions malséantes, rient de mes moindres paroles avec des airs sournois et vicieux, m’indiquent d’invraisemblables remèdes…

J’ai peine à me défendre entre leurs mains curieuses et leurs langues déchaînées. Yakout, la favorite, s’est emparée de ma bague, qu’elle prétend échanger contre un vulgaire anneau dont elle fait miroiter devant moi, la pierre.

Elles sont toutes couvertes de joyaux et de brocarts rutilants ; elles exhalent des parfums violents et leurs visages si fardés ont des expressions plus équivoques encore que ceux des cheikhat de Fès. Où donc le tajer Ben Melih a-t-il été recruter son harem ? Les esclaves rivalisent avec leurs maîtresses d’inconduite et de propos obscènes.

Une jeune fille très brune, aux épaisses lèvres violettes et sensuelles dans la face ronde, se glisse près de moi et murmure une plaisanterie, que je feins n’avoir pas entendue.

Elle ne connaît pas la honte ! C’est Halima, la fille aînée du marchand, l’immariable jouvencelle. Qui voudrait épouser celle que tous les hommes du pays ont approchée ? Ses scandaleuses aven-