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derrière les vieux murs en ruines

chaient si exactement ensemble, que leur carillon semblait unique… Mon cousin, ce Sidi M’hammed Lifrani qui fut khalifa du sultan, prétendit avoir des droits sur l’héritage de Lella Aïcha Mbarka. Il revenait à moi seul, et comprenait de grands biens. Le cadi ne manqua point d’en juger selon l’évidence. Alors, tandis que j’étais à Marrakech, Sidi M’hammed fît enlever une des pendules, par vengeance, et il jura que je ne la reverrais jamais. À mon retour, on me dit qu’elle était cassée. Je n’en crus rien, tous mes esclaves furent battus jusqu’à ce que l’un d’eux m’eût raconté la chose…

» À cette époque, Sidi M’hammed était plus puissant que moi. Que pouvais-je faire ? Je me tus.

» Or, ajouta le Chérif en riant, mon cousin est mort. Ses biens revinrent à la fille qu’il avait enfantée avec la négresse Marzaka… Tu vas souvent la voir… L’aurais-tu remarquée, cette pendule ?

J’affirmai, très sincèrement, qu’il y avait beaucoup d’horloges et de pendules chez mes voisines, mais qu’aucune d’entre elles ne valait celle-ci par la perfection du travail ni l’ancienneté.

— Qu’importe ! reprit Mouley Hassan. Je verrai bientôt par moi-même, car, s’il plaît à Dieu, j’épouserai la fille de mon cousin dans quelques mois… Quand tu reviendras dans ce pavillon, tu y trouveras les deux pendules.

Il dit cela nonchalamment, comme une chose toute naturelle et certaine, mais sur laquelle il