Sidi ben Aïssa, s’éloignant de la ville, suivi de quelques fidèles, passa près de la demeure de Sidi Saïd, également réputé pour sa sainteté, et dit :
— Celui qui n’a pas de feu en emprunte au voisin.
À ces paroles, Sidi Saïd saisit une outre vide, souffla dedans avec force et, par un prodige d’Allah, Lui seul est tout-puissant, le ventre du Sultan se mit à gonfler démesurément, en même temps que l’outre…
Le souverain, affolé, implora son pardon. Il ne l’obtint qu’en rappelant l’exilé à Meknès et en s’humiliant devant Dieu.
Mais les disciples de Sidi ben Aïssa, frappés par le miracle, voulurent abandonner leur maître pour se ranger sous la direction de Sidi Saïd.
— Qu’avez-vous à faire de mes conseils ? leur demanda celui-ci, votre cheikh est complet.
Et il les renvoya, persuadés, auprès de lui.
C’est ainsi que Sidi ben Aïssa fut surnommé le « Cheikh el Kamel » (le cheikh complet), et que sa mémoire demeura jointe à celle de Sidi Saïd, en une même vénération.
Après la mort de Sidi ben Aïssa, ses disciples donnèrent les marques d’une excessive douleur.
Depuis lors, ils se réunissent chaque année à Meknès, pour le Mouloud, emplissant la ville de leurs chants, de leurs musiques et de leurs danses.