Page:Leon Wieger Taoisme.djvu/393

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B. Ils étaient circonspects comme celui qui traverse un cours d’eau sur la glace ; prudents comme celui qui sait que ses voisins ont les yeux sur lui ; réservés comme un convive devant son hôte. Ils étaient indifférents comme la glace fondante (qui est glace ou eau, qui n’est ni glace ni eau). Ils étaient rustiques comme le tronc (dont la rude écorce cache le cœur excellent). Ils étaient vides comme la vallée (par rapport aux montagnes qui la forment). Ils étaient accommodants comme l’eau limoneuse, (eux, l’eau claire, ne repoussant pas la boue, ne refusant pas de vivre en contact avec le vulgaire, ne faisant pas bande à part).

C. (Chercher la pureté et la paix dans la séparation d’avec le monde, c’est exagération. Elles peuvent s’obtenir dans le monde.) La pureté s’obtient dans le trouble (de ce monde), par le calme (intérieur), à condition qu’on ne se chagrine pas de l’impureté du monde. La paix s’obtient dans le mouvement (de ce monde), par celui qui sait prendre son parti de ce mouvement, et qui ne s’énerve pas à désirer qu’il s’arrête.

D. Celui qui garde cette règle de ne pas se consumer en désirs stériles d’un état chimérique, celui-là vivra volontiers dans l’obscurité, et ne prétendra pas à renouveler le monde.


Résumé des commentaires.

Tchang-houngyang explique ainsi le dernier paragraphe D, assez obscur, à cause de son extrême concision : Celui-là restera fidèle aux enseignements des anciens, et ne se laissera pas séduire par des doctrines nouvelles. Cette explication paraît difficilement soutenable.


Chap. 16. Texte.


A. Celui qui est arrivé au maximum du vide (de l’indifférence), celui-là sera fixé solidement dans le repos.

B. Les êtres innombrables sortent (du non-être), et je les y vois retourner. Ils pullulent, puis retournent tous à leur racine.

C. Retourner à sa racine, c’est entrer dans l’état de repos. De ce repos ils sortent, pour une nouvelle destinée. Et ainsi de suite, continuellement, sans fin.

D. Reconnaître la loi de cette continuité immuable (des deux états de vie et de mort), c’est la sagesse. L’ignorer, c’est causer follement des malheurs (par ses ingérences intempestives).