Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 1.djvu/13

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C’est qu’avec nos préjugés, aussi absurdes que les idées des sauvages sur les éclipses, la rébellion, cet obscurcissement de l’Autorité, nous apparaît comme une manifestation consciente de cet Esprit du mal, opposé, dans les traditions religieuses, à l’Esprit du bien, sous ses diverses dénominations : Dieu, Providence, État, Ordre Social, Morale, Loi, Salut Public, Majorité, etc., etc. Le rebelle, c’est toujours, selon les mythologies, une incarnation de l’Arihman du Mazdéisme, du Caïn biblique, du Satan judæo-chrétien, du Diable cornu, à l’appendice caudal déconcertant et à la fourche grotesque, dont on fait peur aux enfants, et aussi à un certain nombre de grandes personnes.

Pourtant il est des rébellions admises, et des rebelles non seulement excusés, mais admirés. Les révoltes, guerres civiles, ou simples brutalités de palais et de corps de garde, sont prises en considération par l’Histoire, lorsqu’elles ont pour point de départ l’Ambition, l’Orgueil et la Cupidité, lorsque pour but elles eurent l’accroissement de la Servitude, l’extension de la domination, le renforcement de l’Autorité. Ces révoltes, amnistiées par le succès et par l’intention égoïste de ceux qui les conduisirent, ou en profitèrent, prennent le titre honorable de Révolutions, et l’on élève des monuments afin d’en perpétuer la gloire ; on frappe des médailles en leur honneur. Les autres, les révoltes populaires, qui furent tentées uniquement pour introduire plus de justice dans la société, plus d’égalité dans les rapports des êtres, plus de bonheur dans l’humanité, demeurent éternellement honnies et maudites. On n’en parle qu’avec hésitation et réserve. Ceux qui les firent sont campés au pilon de l’opinion. On ne les cite que comme