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LIVRE I

UN GOUVERNEMENT PROVISOIRE

LENDEMAIN DE VICTOIRE

Le dimanche 19 mars, le soleil se leva clair et gai sur la ville paisible, reposée. La journée s’annonçait printanière. Paris s’éveillait rasséréné comme après un cauchemar. Du cachot ténébreux, où la cité prisonnière, même après l’armistice, s’était sentie confinée, les verrous étaient enfin tirés. On retrouvait l’ami soleil ! Beaucoup de Parisiens, au saut du lit, firent le projet d’une promenade à la campagne, c’est-à-dire hors des murs. Dans la zone dévastée, l’on trouverait de l’herbe, de l’air, des guinguettes avec des tonnelles déjà verdissantes, et l’on ramasserait des éclats d’obus épars auprès des maisons écroulées. On ferait, en régalant ses poumons d’oxygène et ses yeux d’horizons, l’inventaire rapide des désastres suburbains. On paraissait oublier qu’on avait, la veille, assisté à une révolution.

Dans les quartiers du centre, c’était la grasse matinée. Les rues étaient sans animation. Aux faubourgs, les ménagères allaient aux provisions, comme à l’ordinaire, sans paraître alarmées, ni disposées à des bavardages plus