Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/190

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L’Assemblée résolue, d’accord avec le pouvoir exécutif, à reconstituer dans le plus bref délai possible les administrations municipales des départements et de Paris sur la base des conseils élus, passe à l’ordre du jour.

Ainsi se termina cette longue et mémorable séance qui n’eut aucun résultat pratique. Un journaliste de la réaction, M. Albert Duruy, ne put dissimuler le néant de cette discussion :

Voilà certes une journée qui n’est pas pour arranger les choses, écrivait-il dans sa lettre de Versailles, datée du 21 mars, envoyée à La Liberté. Est-ce la faute des hommes où des circonstances, mais le fossé va s’élargissant de plus en plus entre Paris et l’Assemblée, et l’on ne fait rien pour le combler ; au contraire, il semble qu’on le creuse à plaisir…

Ah ! si le gouvernement avait l’intention de rentrer dans Paris par la force, s’il était suffisamment sûr de l’armée pour tenter l’aventure, s’il avait un plan enfin, je comprendrais qu’il ait repoussé la proposition des députés-maires… tout le plan du gouvernement Consiste à laisser Paris faire ses affaires lui-même. Alors pourquoi s’être opposé aux élections municipales ? pourquoi n’avait-on pas fixé le jour ? pourquoi n’avait-on pas essayé du scrutin, puisqu’on renonçait à employer la force ?…

La réponse à ces questions indiscrètes, que posait M. Albert Duruy, fut fournie par Mac-Mahon et Thiers, par le second siège de Paris et l’assaut final avec la tuerie en masse. Comme la plupart de ses contemporains, M. Duruy ne pouvait se douter que M. Thiers était le plus grand fourbe de l’époque, qu’il avait son plan, qu’il en poursuivait avec astuce la réussite, et qu’il avait, bien nettement arrêtée, l’intention de rentrer dans Paris par la force, quand il aurait réuni l’armée sûre qui lui était nécessaire pour tenter l’aventure. Le fossé entre Paris et l’Assemblée, il cherchait à l’élargir jusqu’au jour où il pourrait le com-