Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/317

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fusillés et pendus. Le cri dont Floquet a endossé la responsabilité était celui de toute la démocratie. On a affirmé que c’était Gambetta qui avait ainsi apostrophé le czar. Cette attestation, produite par l’ancien préfet de police Andrieux, a été contestée par les amis intimes de Gambetta, notamment par MM. Reinach et Ranc. Le maréchal Lebœuf, qui accompagnait le czar pendant sa visite au Palais, a déclaré que, des rangs de plusieurs avocats formant un groupe dans le vestibule, partit ce cri : « Vive la Pologne ! Il ne fut pas accompagné du fameux mot reproché : « Monsieur ! » Ce fut plutôt, a dit le maréchal, une protestation qu’une manifestation. Les avocats se dispersèrent bientôt dans la foule. Lebœuf ne put ni reconnaître Gambetta, ni remarquer Floquet, qu’il ne connaissait pas. Le maréchal fut interviewé à ce sujet, par un rédacteur du Gaulois, lui disant : « La légende veut qu’un avocat se soit avancé vers la voiture d’Alexandre II au moment de son départ, et ait crié « Vive la Pologne, Monsieur ! » Lebœuf dit très énergiquement au reporter, sachant bien que sa dénégation serait reproduite et divulguée partout : « C’est absolument faux, je vous l’affirme. D’ailleurs l’incident a eu lieu au haut de l’escalier du Palais, au moment où nous arrivions, et il n’a pas eu de suite. Je ne sais même pas si le czar s’en est aperçu. En tout cas il n’en souffla mot, ni sur le moment, ni au retour dans la voiture. »

Le démenti est catégorique, probant aussi, émanant d’un adversaire politique, et le cri fameux n’est plus qu’une légende, malicieuse ou malveillante. Accréditée par la presse réactionnaire, l’anecdote par elle inventée se répandit vite dans les milieux mondains hostiles à la République. Elle y a cours encore.

Elle prit même une certaine importance, en Russie, par la suite. En 1888, M. Floquet était président du Conseil, on