Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/332

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d’être un historique complet de la révolution de 1871 ; il ne sera que le récit des événements dans lesquels j’ai pris une part directe. Mais j’espère que sa sincérité et son exactitude en feront une œuvre utile pour ceux qui voudront entreprendre un travail d’ensemble sur cette remarquable époque.

Je puis dire hautement que ce n’est pas l’ambition qui me pousse à écrire ces pages. Par le passage suivant d’une lettre que j’adressais au colonel Ch. Duval (de la garde nationale), en 1870, après la bataille de Buzenval, on verra que j’ai toujours compris que défendre la République était un devoir, et non pas, comme le croient nos députés actuels, un moyen d’arriver aux honneurs et au pouvoir. Voici cette lettre :

« Mon colonel, après vous avoir donné les noms des braves citoyens tués à Buzenval pour la Patrie et la République, je vous ajoute les noms de ceux qui ont été blessés grièvement, afin que vous puissiez obtenir de M. le général en chef de a la garde nationale les récompenses que vous désirez demander pour eux.

« Je termine, mon colonel, en vous réitérant la défense formelle que je vous ai faite à Arcueil, lors de votre rapport au général Corréard sur la conduite que j’avais tenue à la reconnaissance du parc de Bagneux occupé par les Prussiens (13 octobre 1830). Je ne désire aucune récompense. Le républicain dévoué, convaincu, ne doit voir dans le sacrifice de sa vie qu’un devoir qu’il accomplit, et non pas une voie ouverte à son ambition ».

M. Charles Duval existe, j’en appelle à son témoignage. Je n’avais qu’un désir : aider à la conclusion d’une paix honorable, qui m’eût permis de rentrer dans la vie privée.

Ce désir était le même au 18 mars ; que nous eussions été vainqueurs, et je ne me fusse pas écarté de cette ligne de conduite.

On peut juger l’homme d’après ces nobles sentiments. Sa définition du devoir d’un républicain, dans sa lettre au colonel Duval, mériterait, comme les plus belles paroles des glorieux citoyens de Rome, de figurer dans un De Viris français, s’il en existait un.

Son désintéressement égalait sa bravoure.

Quelque temps avant le 18 mars, Lisbonne, sur le conseil