Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/345

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de Trochu avait indignés. La capitulation l’exaspéra, et il eut le désir téméraire de s’opposer à l’entrée des Prussiens dans Paris. C’était insensé, impossible à réaliser, dangereux même pour la cité et pour la patrie. Dans l’état où se trouvait Paris, avec les forts aux mains des ennemis, disposés à saisir le prétexte d’une résistance quelconque pour écraser l’imprenable cité sous les obus, heureux d’achever le sauvage et inutile bombardement de janvier, cette fois pire et plus dévastateur, à raison du tir rapproché, la tentative de Brunel pouvait être considérée comme criminelle aussi ; mais cette exacerbation du patriotisme ulcéré peut être blâmée tout haut, et tout bas excuse.

Avec le lieutenant-colonel Piazza, Brunel fit donc afficher, dans la nuit du 28 janvier, un ordre à la garde nationale. Cet appel, que son auteur avait signé : général Brunel, prescrivait aux bataillons de prendre possession des forts et d’empêcher leur remise aux Prussiens. Les gardes en possession des forts devaient reprendre et continuer les hostilités. On a vu que, par l’intervention du Comité Central recommandant le calme, la collision terrible fut évitée. La population ne bougea pas. Un nombre infime de gardes avait répondu à l’appel. Brunel et Piazza furent arrêtés, déférés au Conseil de guerre. Ils furent acquittés sur le chef d’excitation à la guerre civile, car ils pouvaient légitimement soutenir qu’ils n’avaient voulu qu’exciter à la continuation de la guerre étrangère, mais ils furent condamnés à deux ans de prison, pour avoir usurpé la qualité et les fonctions l’un de général, l’autre de chef d’état-major. Ils furent délivrés par le peuple qui força la prison. Brunel fut ensuite nommé membre du Comité Central, puis général commandant, avec Eudes et Duval. Elu membre de la Commune dans le VIle arrondissement par 1,947 voix, il siégea peu à l’Hôtel-de-Ville. Il jugea que sa place était ailleurs.