Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/364

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à cette date anticipée, non pas seulement quatre jours, mais, au moins huit ! Or rien de pareil n’était arrêté. Ranvier, pas plus que les autres membres du Comité Central, ne songeaient à mettre les bataillons en route dès la Commune élue. Il fallait l’installer cette Commune, prononcer des discours, nommer un bureau et s’amuser à des débats de législature, parader et pérorer, au lieu de se battre. Le changement de date ne changeait rien. Par conséquent, il était indifférent à la cause parisienne que les élections eussent lieu le jeudi au lieu du dimanche. Puisqu’on voulait procéder avec une apparence de légalité, il fallait accepter la date arrêtée, d’accord avec les maires, par les deux envoyés du Comité. Ils n’avaient pas eu mission de traiter sans doute ; ils se trouvaient sans pouvoirs réguliers, c’était la vérité même, mais en temps de révolution doit-on se montrer aussi formaliste ? Puisqu’au fond le Comité désirait une transaction, puisque la population l’attendait, l’exigeait, puisque personne, sauf Thiers, ne tenait à ce qu’il y eût bataille, il eût été plus adroit de ne pas donner aux maires motif de crier qu’on avait rompu les conventions, et qu’on leur avait imposé, par la menace, une date, que pas plus que les deux délégués ils n’avaient mandat d’accepter.

Si Brunel et Protot étaient considérés à l’Hôtel-de-Ville comme ayant outrepassé leurs pouvoirs, ce qui était incontestable, car ils n’avaient mission que de reprendre les mairies avec l’appui des bataillons de Lisbonne, les maires, de leur côté, pouvaient être désavoués par Versailles, pour avoir dépassé leur mandat. C’était donc une maladresse de plus que commettait le Comité Central.

Au lieu d’embarrasser les maires et de les mettre dans une mauvaise posture vis-à-vis du gouvernement, le Comité sottement et imprudemment les dégageait.