Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/367

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’il cherchait, mais à son heure, quand il se croirait maître de la situation.

Le soulèvement de la province, épuisée en partie par l’invasion, lasse de toute guerre, aspirant à la détente et au repos, était sans doute problématique. Le Comité Central eût-il été encore plus conciliant, eût-il cédé sur la date, comme sur tous les autres points, que M. Thiers, ayant fini de rassembler ses troupes, n’eût pas renoncé pour cela à son ferme dessein de les lancer sur Paris, et de rentrer en maître dans la ville châtiée. Mais au moins cette chance de salut, la seule, restait aux Parisiens de prouver aux provinciaux que l’assemblée de Versailles et ses chefs refusaient toute conciliation, parce qu’elle aurait pour résultat de mettre la République hors d’atteinte, d’ôter tout espoir aux monarchistes.

Les républicains départementaux étaient nombreux, déjà organisés, ayant mis à profit le 4 septembre et le gouvernement de Gambetta, pour prendre les fonctions, pour se grouper et influencer l’opinion hésitante. Si on avait pu leur démontrer que Paris ne voulait que ses libertés municipales, avec le maintien d’une république modérée, mais démocratique, la province se fût opposée de tout le poids de son nombre aux combinaisons des politiciens réactionnaires, dont M. Thiers était tantôt le chef et tantôt le serviteur. Mais les provinciaux virent seulement dans les Parisiens des rebelles, avec qui nulle transaction n’était possible, et ils les abandonnèrent à leur sort inquiétant, comme des gens intraitables, qui n’avaient même pas voulu céder sur une chose aussi secondaire que l’ajournement, pendant quelques heures, de l’élection du conseil municipal ! Ce sentiment, bientôt général dans les départements, fit la victoire de Versailles et la perte de Paris.