Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/42

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sion donnée et de subir l’énergie de la vitesse acquise :

LES PREMIÈRES FAUTES

Le Comité Central était-il donc destiné à périr, à avorter, dès le 19 mars, à raison de sa nouveauté, de son manque de prestige ? Oui, s’il voulait gouverner, légiférer, organiser les services publics, convoquer les électeurs, constituer un pouvoir communal usurpant les attributions nationales. Au contraire, il pouvait durer et imposer une république nouvelle au pays, s’il savait borner son rôle à celui d’un comité révolutionnaire, d’une junte insurrectionnelle, ne cherchant que la victoire, finissant par l’obtenir, et entraînant toute la nation à en profiter. Il avait pris les armes le 18 mars, il ne devait pas les déposer le 19. Ce n’était pas à l’Hôtel-de-Ville qu’il devait siéger, mais sur les hauteurs de Ville-d’Avray, de Meudon, de Marly, menaçant Versailles, cernant l’Assemblée au moment de sa réunion, le 20, la dispersant, l’anéantissant, brisant son prestige d’autorité, abolissant son autorité, comme au 4 septembre avait été abolie l’autorité avec le caractère légal du Corps législatif mis en fuite. Le Comité Central aurait dû poursuivre une tâche unique, un but fixe et opiniâtre : la suppression de l’Assemblée nationale par l’intimidation, par la déroute, au besoin par l’arrestation de ses membres.

C’eût été, dira-t-on, un procédé criminel, rappelant le dix-huit brumaire et le deux décembre. Voilà une objection sentimentale à mettre au rancart. La différence du but eût effacé le mauvais effet de l’analogie des moyens. Est-ce qu’un chirurgien, s’armant d’un couteau, l’enfonçant dans la chair vive, ne procède pas comme un assassin ? Cependant on ne s’avise pas de le qualifier de meurtrier, parce qu’on sait que, s’il répand le sang, c’est pour ramener la