Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/428

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rigueurs administratives sous le climat déprimant de la Guyane. Il a laissé un livre intitulé De Paris à Cayenne, journal d’un transporté, intéressant et douloureux récit de ses souffrances et de ses misères. Il reprit, aussitôt rentré, son activité révolutionnaire. Il attaqua et dénonça au mépris populaire les ouvriers phraseurs de l’Internationale à son début, qui se laissaient flatter et subventionner par le gouvernement impérial. Il se montra implacable adversaire de ceux qu’il nommait les démocrates césariens. L’Empire libéral ne lui disait rien qui vaille, et les demi-concessions de Napoléon III lui paraissaient surtout susceptibles d’amollir les travailleurs et de les détourner de la Révolution. Il avait tort, car les réformes dues à Émile Ollivier fournissaient des armes redoutables contre le régime impérial : la presse était sans cesse menacée, il est vrai, mais sous son bâillon, elle parlait, elle excitait l’opinion ; des plumes puissantes ébranlaient le trône et les institutions impériales ; les ouvriers pouvaient se coaliser, organiser des grèves ; les réunions publiques devenaient autorisées, où l’empire, ses fonctionnaires, ses actes, ses origines, ses crimes, étaient traduits devant un jury populaire. Les lois neuves, imprudemment données par l’empire libéral, constituaient un arsenal, jusque-là inexistant, où les républicains puisaient.

Tout en faisant dans son journal une propagande vive, en combattant l’empire par de quotidiennes polémiques, l’ancien émeutier du règne de Louis-Philippe, le revenant de Cayenne, guettait l’heure de susciter une agitation dans la rue. Il cherchait l’occasion et les moyens de provoquer une insurrection. Il savait, par expérience, qu’un soulèvement peut avoir un début presque insignifiant ; puis on le voit soudainement grandir et devenir irrésistible. Il faut toutefois cette condition, que l’agitation soit continuée et accrue