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LES CHIFFRES

On a beaucoup ergoté sur les chiffres du vote du 26 mars. Ces chiffres électoraux n’ont qu’une apparence de vérité. Il faut vérifier comment ils sont fournis.

On comptait, pour le vote du 26 mars 1871, 481,000 inscrits, chiffres ronds, et il y eut seulement 230,000 votants. Au premier coup d’œil il y a un écart considérable, et la proportion des abstentionistes paraît anormale. Les adversaires de la Commune en ont conclu que près de 50 o/o des électeurs étaient hostiles le 26 mars ; la Commune ne fut donc qu’un gouvernement de minorité. C’est là une grossière illusion d’optique, dans laquelle la complaisance entre pour une bonne part. La statistique se prête aux arguments et aux désirs des partis.

Assurément une élection à laquelle la moitié du corps électoral, avec une volonté consciente et dirigée, avec discipline et tactique aussi, refuserait de participer, serait moralement compromise, et les mandataires choisis par ce corps électoral scindé, qui serait encore divisé, diminué, car tous les volants ne seraient pas du même avis sur toutes les questions, ne pourrait prétendre représenter qu’une minorité : le mandat serait dénué de valeur. On considère en ce cas comme des opposants ceux qui s’abstiennent. Il serait peut-être plus rationnel de considérer comme des adhérents tacites au régime existant ou au parti dominant au moment de la consultation, ceux qui ne se donnent pas la peine de venir déposer leur protestation. Ce serait l’application de l’adage : qui ne dit mot consent. Mais, dans la pratique on compte les abstentionnistes comme s’ils avaient voté « contre ». On balance les suffrages exprimés par ceux qui ne le sont pas. Comptabilité abusive. Ceci fait que les partis extrêmes, n’ayant pas présenté de candidats, s’attribuent