Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/455

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de la capitulation des maires, il y eut de ces bataillons qui ont marché dans les rangs de la Commune. Ils ont été troublés par cette espèce d’abandon des pouvoirs. En outre, on a été entrainé par le spectacle de ce qui se passa autour de soi. On n’entendait plus que les voix des partisans de la Commune, on ne lisait plus que les affiches de la Commune. Non seulement parmi les ouvriers, mais dans la bourgeoisie, on disait : c’est un gouvernement comme un autre ! c’était un gouvernement quelconque, et cela suffit en France pour qu’on soit obéi. À la fin, la Commune avait plus de partisans qu’au commencement.

Cette psychologie de la popularité de la Commune est remarquable. Comme le dit, avec une profonde justesse, M. Édouard Hervé : pour beaucoup c’était un gouvernement comme un autre, très républicain, bien intentionné, devant amener une grande amélioration sociale, et cela était la cause de la confiance, de l’enthousiasme même qu’il trouva à ses débuts. Ainsi est expliquée l’illusion qu’eurent beaucoup de citoyens, intelligents et expérimentés, et non des utopistes ou des fanatiques, sur la durée de ce régime très possible, qui correspondait à bien des désirs, à bien des espérances. Nombre d’adhésions au gouvernement issu des élections du 26 mars trouvèrent, dans cette ambiance crédule et confiante, leur logique et leur justification.

Qu’a-t-il donc manqué à ce gouvernement pour qu’il durât, pour qu’il prit racine et pût se développer, s’améliorer, s’adapter aux besoins et aux nécessités du moment ? Des éléments secondaires lui firent certainement défaut : son infériorité militaire fut une cause d’échec final, mais la seule, la dominante cause de l’avortement de la Commune fut l’existence de la Commune elle-même.

Sans la préoccupation, honorable mais impolitique, de se transformer en gouvernement régulier, sans cette impatience de la sanction du suffrage universel, le Comité Central eût agi en pouvoir provisoire insurrectionnel, il ne se