Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/466

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du côté de la Commune, en considérant seulement la bonne digestion de leur proie. Victorieuse, la Commune devait, pour se maintenir, continuer l’état de paix extérieure, ajourner toute revanche. Si, au contraire, Versailles l’emportait, et sa victoire amenant, comme cela semblait probable, une restauration monarchique, la royauté pour se rendre populaire devrait entretenir des idées de guerre. Le roi ou l’empereur restaurés ne pourraient se faire supporter qu’en se faisant les champions de la France intégrale, et en préparant la restitution des provinces conquises. D’où une menace pour l’empire allemand. Il en fut, il est vrai, autrement par la suite : la monarchie ne put s’installer et les républicains modérés, qui s’emparèrent peu à peu du pouvoir, grâce à la résistance de la Commune en 1871, renoncèrent à l’idée de revanche pour asseoir et développer les institutions républicaines ; mais les Allemands, ni personne, ne pouvaient prévoir ce résultat.

Les sympathies allemandes furent donc acquises dès le premier jour à Versailles, qui représentait la lutte contre la démocratie, contre la libre pensée, contre le socialisme, toutes idées en horreur à l’aristocratie militariste et rétrograde de Berlin. S’il y eut, en ces tristes heures, un protégé de l’Allemagne, ce fut le gouvernement de M. Thiers, et non la Commune.

La dépêche suivante du général allemand von Fabrice, adressée à M. Jules Favre, ministre des affaires étrangères, publiée le 27 mars, dissipait dès la première heure toute équivoque et ne pouvait laisser subsister aucun doute sur les dispositions des autorités allemandes.

Rouen, le 26 mars 1871.
Monsieur le ministre,

Une communication purement militaire, envoyée dernièrement par le chef de l’état-major de la troisième armée allemande à