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eux, n’étaient pas frappés d’incapacité présumée à raison de leur obscurité, et à qui la France eût fait crédit, si le Comité Central, au lieu de s’occuper d’abolir la conscription et d’installer ses délégués dans les ministères et les grandes administrations, eût canonné Versailles de la crête des collines qui l’environnent, après l’avoir entouré, ce qui était facile dans la journée du dimanche, d’un cercle de fer. On eût empêché les députés, les bons et les mauvais, de s’échapper, d’aller installer au loin un fantôme d’assemblée nationale ou de se fortifier dans la cité de Louis XIV, devenue le camp retranché de la réaction.

Donc le Comité Central eut le tort de s’endormir sur Sa facile victoire du samedi, 18, et de ne pas poursuivre Thiers et les fuyards l’escortant, la baïonnette dans les reins. C’est à Versailles que la Commune devait être imposée, avant d’être proclamée à Paris.

Pourquoi le Comité n’a-t-il pas marché sur Versailles, dès le dimanche soir ? Pourquoi a-t-il hésité et permis à Thiers de gagner du temps et d’amuser la révolution avec les négociations fallacieuses des maires ? Deux raisons sont données à cette temporisation ; les historiens favorables à la cause parisienne ont cru devoir les reproduire, avec approbation. Ce ne furent pourtant que deux illusions, deux craintes imaginaires.

Il convient de dire, pour l’excuse du Comité, que ces deux illusions et ces deux craintes, toutes chimériques qu’elles nous semblent aujourd’hui, étaient alors prises très au sérieux et considérées comme très réelles.

C’était d’abord la persuasion que l’on avait, et dans tous les milieux, d’un retour offensif de Thiers et de Vinoy. Toute l’après-midi du 18 et une partie de la journée du 19 se passèrent à se prémunir contre une attaque jugée certaine, contre une revanche présumable de l’armée, et à atten-