Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/470

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tance fonction de président : « le trône du citoyen Assi », a dit le Paris-Journal. Quatre escaliers, deux communiquant avec l’intérieur de l’Hôtel-de-Ville, les deux autres donnant accès sur la place, desservaient cette tribune. Des mitrailleuses étaient alignées devant l’estrade, l’isolant. En avant, formant un rideau flottant, les drapeaux et les fanions s’élevaient déployés. Sur le quai avaient été disposées les batteries, chargées à blanc, devant tirer en l’honneur de la proclamation de la Commune. La place était noire de monde. Un espace vide avait été réservé pour la manœuvre du défilé. Les bataillons, massés avec ordre, attendaient, avenue Victoria et sur les quais, le signal pour se mettre en marche. Les nuages passaient rapides dans le ciel très bleu, et le soleil illuminait les édifices, les visages, faisait scintiller les armes et miroiter les piques dorées des drapeaux.

À quatre heures, le général Brunel, placé au pied de l’estrade, leva son sabre : aussitôt clairons et tambours rangés au centre de la place sonnent et battent aux champs, tandis que les pièces d’artillerie commencent leurs salves. De l’Hôtel-de-Ville sortent processionnellement les membres du Comité Central en uniforme, avec l’écharpe rouge en sautoir, suivis des membres de la Commune, dont plusieurs sont en vêtements civils, sans insignes. On les acclame. Le grondement formidable de la foule, les cris de « Vive la République ! Vive la Commune ! » sortant de trente mille poitrines couvrent la voix de basse des canons. Les baïonnettes oscillent, luisantes, au-dessus des têtes ; des képis sont hissés au bout des fusils ; les femmes agitent des mouchoirs ; aux fenêtres se déroulent banderolles et bannières, et les drapeaux majestueusement s’inclinent, comme les emblèmes religieux, au moment de l’Elévation, dans une cathédrale.