Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/471

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Assi, au centre de l’estrade, debout, étend la main. Il va parler. L’ordre est donné aux clairons et tambours de faire silence ; les pièces de 7 du quai deviennent muettes, mais la rumeur de la foule est inapaisée. Un confus ronronnement d’océan par un beau temps. On ne perçoit, de la place, que de vagues éclats du discours d’Assi. On suppose qu’il dit des choses excellentes, et on l’applaudit de confiance, avant même qu’il ait achevé sa péroraison. On distingue seulement son dernier effort, pour dominer la houle humaine au tumulte sourd et continu, se terminant par le cri de : « Vive la Commune ! » qu’on entend seul. Mille voix répètent : Vive la Commune !

Un maigre personnage, portant l’uniforme de chef de bataillon, avec l’écharpe du Comité Central, s’est avancé sur l’estrade, au premier rang. Il tient un papier à la main. Ce renseignement court dans la foule : C’est Ranvier ! Des voix crient : « Bravo, Ranvier ! » On voit l’orateur remuer les lèvres, suivre des mots qu’il lit sur son papier. Les bien renseignés colportent cet avis : « C’est le nom des élus qu’il proclame ! » On applaudit avec vigueur. Ranvier fait un salut, met son papier dans sa poche, et s’efface derrière Assi, qui s’est de nouveau levé. Un court silence, au milieu duquel la forte voix à l’accent méridional d’Assi parvient à faire entendre cette déclaration : « Au nom du peuple, la Commune de Paris est proclamée ! »

Aussitôt, parmi le fracas des applaudissements, la Marseillaise éclate, rugie par vingt musiques des bataillons, soutenue à l’unisson par vingt mille voix chantant à plein gosier de tous côtés, sur la place, avenue Victoria, sur les quais. Le canon tonne et les drapeaux flottent au vent.

Le général Brunel cependant s’est porté avec son état-major au bout de l’estrade. Il étend son sabre et le défilé des bataillons commence. Il s’effectue avec le plus grand