Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 3.djvu/118

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autorisent et peuvent justifier tous les soupçons. Cependant créance est duc, jusqu’à preuve du contraire, aux hardis et aux impatients qui tentent un mouvement dans la rue, si invraisemblables que soient les chances de réussite. À toutes les époques, on a voulu voir des agents provocateurs dans les insurrections. Il en existe, sans doute, mais leur action n’est jamais aussi décisive qu’on le croit, ou plutôt qu’on le dit. C’est surtout en matière d’émeutes que le succès est justificatif. On n’a jamais vu soupçonner l’impulsion d’agents provocateurs dans les mouvements populaires qui ont triomphé. L’Histoire n’a ni cherché, ni trouvé, la participation des émissaires de la police lors de la prise de la Bastille, ni dans l’invasion par le suffrage universel de l’Hôtel-de-Ville en Février 48, ni au Dix-Huit mars. Ces agents provocateurs existaient, mais c’étaient tous les citoyens qui voulaient la Révolution.

Pour Lyon et pour l’émeute de la Guillotière, j’estime qu’on doit laisser de côté la supposition du docteur Crestin, en ce qui touche des agents thieristes envoyés ou commandés pour déchainer une population bien tranquille et qui ne prêtait qu’une oreille résistante aux excitations révolutionnaires, d’où qu’elles vinssent. À la Guillotière, le rôle des provocateurs a été fort peu décisif et l’émeute semble due à des causes purement locales. Les citoyens qui ont cru devoir prendre les armes le 30 avril, et interrompre la consultation électorale dans leur quartier, étaient sans doute des exaltés, des mécontents, et ils se sont d’eux-mêmes portés à envahir la mairie et à proclamer maire un des leurs, le citoyen Bouret, qui n’a pas plus accepté cette fonction périlleuse que le docteur Crestin, précédemment acclamé. Ces insurgés n’obéissaient pas à un mot d’ordre venu de Versailles, ni à une consigne donnée à la préfecture du Rhône. Mais il est probable, il est certain même,