Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 3.djvu/266

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

m’avait pris pour aide de camp, et je l’avais rejoint à la porte Maillot, où les bataillons fédérés étaient rassemblés pour la sortie. Il m’envoya de la route de Rueil, dans l’après-midi, après le reçu de la dépêche de Bergeret demandant du secours, prévenir celui-ci de son arrivée et lui dire de se concentrer avec lui. Quand je revins rendre compte à Flourens de ma mission je le trouvai avec Cipriani, entouré d’une foule d’officiers et de simples gardes qui les accablaient d’invectives, se croyant trahis. Les obus commençaient à tomber sur le village et c’est ce qui les exaspérait.

Flourens, se voyant en butte à tant de reproches, descendit de cheval, et sans mot dire, très pâle, il se dirigea vers la campagne. Je fis pars de mes appréhensions à Cipriani, en lui disant : « Vous le connaissez mieux que moi, suivez-le et empêchez-le de faire un mauvais coup. »

Cipriani mit pied à terre et suivit Flourens, qui déjà était loin. Je restais seul à cheval, lorsqu’après un obus qui éclata tuant plusieurs fédérés, toute leur colère se tourna vers moi, qui avais gardé mon uniforme d’officier de chasseurs à cheval : Ils me traitèrent de traître et de versaillais, disant qu’ils allaient me faire mon affaire de suite. Heureusement les artilleurs que j’avais emmenés prirent ma défense et calmèrent la colère des fédérés. Pendant ce temps les obus ne cessèrent de pleuvoir. On me dit : « Puisque vous êtes monté, allez voir où est Flourens. » Je pris le galop dans la direction qu’il avait suivie…

(Louise Michel. — La Commune, p. 180, Paris, Stock, éd., 1898.)

Hector France revint donc vers l’endroit où il avait laissé Flourens et Cipriani. Il chercha, frappa à diverses portes, sans obtenir de réponse et ne put retrouver Flourens, qui déjà était réfugié dans l’auberge. Hector France retourna alors vers les fédérés, qui s’informèrent encore de Flourens, mais les troupes de Versailles approchaient et il fallait se replier en hâte. « Je restais, dit-il, le dernier, à plus de deux cents mètres, regardant toujours si Flourens revenait. Dans les champs, de tous côtés, des buissons et des haies, partirent des coups de fusil sur nous. »

Cette déposition saisissante fait connaître les raisons qui