Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 3.djvu/35

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et les aspirations vagues de ses soldats, ni le temps ni la force pour établir un ordre nouveau et pour entreprendre les grandes réformes sociales souhaitées, dut se borner à les énoncer dans ses programmes et ses manifestes.

Elle fut impuissante à réaliser les vœux et les projets déjà discutés par les diverses écoles démocratiques, formulés par les écrivains et les orateurs des dernières années de l’Empire, acceptés comme des faits presque accomplis par des auditoires crédules et enflammés. La Commune a eu cependant une importance philosophique et éducatrice considérable, et son influence, son esprit, son programme inexécuté se sont perpétués jusqu’à nos jours. C’est plutôt parce qu’elle aurait voulu imposer que par ce qu’elle a pu accomplir, que son renom et son exemple sont en honneur dans tous les pays où il existe un prolétariat militant et comprimé. La Commune, par sa lutte terrible, par sa chute grandiose, a ébranlé toutes les masses des travailleurs dans le monde entier. Tous les révoltés, tous les insurgés contre le capital accapareur et contre les conditions inégales du travail, sur toute la terre, se souviennent de son court passage, l’admirent. Les révolutionnaires cosmopolites regrettent son éphémère existence et s’efforcent de reprendre, en tout territoire propice, son œuvre interrompue. Les moins favorisés par le milieu entreprennent la propagande pour la réalisation de ce qu’elle avait projeté. Les socialistes modernes ont étendu son programme primitif, et pour en exprimer toute la portée, toute l’étendue, ils invoquent le nom de la Commune et sa tradition. Elle apparaît pour les croyants du socialisme entourée d’une auréole messianique. Son impersonnalité aide à cette synthèse révolutionnaire.

La Commune, en effet, n’eut pas de chef. Ce fait anormal fut certainement une cause de faiblesse durant son