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Page:Les Écrits nouveaux, Tome 1, n° 3, 1er jan. 1918.djvu/50

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rebelles d’autrefois et d’aujourd’hui, d’autres scélérats, d’autres brigands.

Bacchanales de sang aux rythmes contemporains. Mélopée antique aux cantiques du présent.



Tout dort dans la belle demeure seigneuriale. La nombreuse valetaille s’est couchée. Seule, dans une chambre bien éclairée, une jeune fille lit. Mise élégante et sobre, mains fines : une aristocrate. Elle a tout, cette belle fille choyée : palais, voitures, domestiques. Pourtant elle se sent mal à l’aise. Il paraît qu’il y a dehors des milliers d’hommes qui souffrent. Elle l’a lu. Elle quittera, cette belle jeune fille, sa demeure seigneuriale, son luxe et comme tant d’aristocrates, elle prendra le parti du peuple. Elles furent de terribles terroristes, ces jeunes filles. Nées dans les palais, elles moururent dans les cachots ou comme forçâtes dans les mines de la Sibérie.



C’est l’été, le bel été russe. Qu’elle est vaste la steppe russe, qu’elle est silencieuse à l’heure de midi sous le soleil torride. La jeunesse se répand un peu partout autour de la propriété du Maître. Les rires francs de la joie de vivre, l’oubli momentané des principes. Pourtant les paysans sont pauvres, ici encore. « Il est malade, ton enfant, paysanne. Attends, nous allons l’aider. Mais pourquoi refuses-tu notre aide ?… » Les fraîches figures s’assombrissent. Le Maître de Police vient en visite. Parler hideux, rire hypocrite, mains corrompues. Il faut tout de même le ménager ; il est si dangereux. Et le mal recommence dans les jeunes cœurs. Ils deviennent tristes. Pourtant la steppe est si grande et la Russie si belle.



La nuit tombe. Dehors il fait bien froid. Le clair-obscur mystérieux de Moscou-la-Sainte est encore adouci par la blancheur laiteuse de la neige. Les cloches des « quarante fois qua-