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Page:Les Œuvres libres, numéro 10, 1922.djvu/10

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vers notre vie, à travers la parole orale ou écrite. Autant cette parole sera la partie, la conséquence de la vie, autant la bouche parlera à travers le cœur. »


Tolstoï, qui s’intéressait passionnément à tout mouvement religieux, était en correspondance avec plusieurs membres d’une secte anglaise « L’Église fraternelle », fondée en 1895.

Dans une lettre écrite, en 1896, à l’un des membres de cette secte, il exprime son opinion sur toutes les organisations religieuses :

« Cher Ami,

« J’ai reçu votre intéressante lettre et désire beaucoup vous répondre, surtout à propos des réformes et du développement moral accomplis parmi vos amis de « l’Église fraternelle ». Le nom ne me plaît pas et ce serait très bien si la réforme le touchait aussi.

« Je pense que la plus grande partie du mal dans le monde vient de notre désir de voir se réaliser ce à quoi nous aspirons, mais à quoi nous ne sommes pas prêts. Il en résulte que nous nous contentons d’un semblant de ce qui doit être. Le gouvernement de violence n’est rien d’autre qu’un semblant de bon ordre qui se maintient par les prisons, les potences, la police et l’armée, fl n’existe pas d’ordre réel ; mais tout ce qui s’y oppose est caché de nos yeux dans les prisons, dans les établissements de coercition, dans les bouges. Je pense que ce mal reste si longtemps incurable parce qu’il est caché. La même chose avec la communauté ou avec les sociétés de l’Église. Elles aussi sont un semblant. Entre des pécheurs ne peut être une communauté