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Page:Les Œuvres libres, numéro 10, 1922.djvu/11

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de saints. Les membres de la communauté, pour conserver un semblant de sainteté, doivent, me semble-t-il, commettre beaucoup de nouveaux péchés. Nous sommes créés ainsi que nous ne pouvons pas devenir parfaits chacun isolément, à tour de rôle ou par groupes ; nous ne pouvons devenir parfaits que tous ensemble. La chaleur d’une goutte ou d une molécule se transmet aux autres. S’il était possible de conserver la chaleur dans une molécule de telle façon qu’elle ne se transmette pas aux autres et ne diminue pas, ce serait la preuve que ce que nous pensions être de la chaleur n’est pas de la vraie chaleur.

« Je pense donc que si nos amis apportaient toute l’attention et l’énergie qu’ils consacrent à maintenir la forme extérieure de la communauté entre eux à leur développement intérieur, moral, ce serait mieux et pour eux et pour l’œuvre de Dieu. Les communautés et autres organisations extérieures ne me semblent utiles et légitimes que quand elles résultent nécessairement de l’état intérieur. Si deux hommes, après avoir réfléchi qu’il est plus avantageux pour eux de vivre sous le même toit et de manger à la même table, s’étaient dit : « Allons habiter et manger ensemble », il est peu probable qu’ils eussent résisté, et qu’ils aient vécu ensemble sans remarquer que les désavantages et les désagréments remportent sur les avantages et les agréments escomptés. Mais si deux hommes qui se rencontrent souvent se prennent à s’aimer, et, chacun étant indifférent à la façon de vivre, de se nourrir, dise à l’autre : Pourquoi vivre séparés si la façon de vivre et de manger nous indiffère et s’il est plus agréable pour nous de vivre ensemble ? » Dans ce cas, il est très probable que ces hommes vivront ensemble jusqu’à la mort. Ainsi donc, la base principale pour l’organisation de la communauté est en rame de chacun.