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Page:Les Œuvres libres, numéro 10, 1922.djvu/8

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Tolstoï traduisit du chinois une légende bouddhique : Les Avadanas (Sur la flèche), à propos de laquelle Tolstoï lui écrivit :

« J’ai reçu votre lettre avec la légende bouddhique. Moi aussi j’ai toujours pensé, comme il se dégage de cette parabole, que le tireur qui lance Ta flèche, c’est le Père qui m’a envoyé dans cette vie. Je ne dois pas chercher à savoir quelle est cette flèche, quel est l’arc, même quel est le tireur ; je dois souffrir cette vie, m’en guérir. C’est une parabole admirable, mais elle n’est pas chrétienne ; elle est antérieure au christianisme, quand la vie n’était envisagée que comme souffrance. Elle est restée cette souffrance (l’épreuve), mais aussitôt qu’elle a été reconnue comme souffrance, elle a cessé de l’être. Dans cette parabole, s’exprime la conscience bouddhiste de la souffrance et des moyens de s’en délivrer. La conscience chrétienne montre la délivrance de la souffrance et maintenant et dans l’éternité ».


D’une lettre de Tolstoï à son ami Roussanov, sur ses occupations littéraires, à la fin de 1880 :

« Je vis très bien. Très sincèrement. Plus ça va, mieux ça va. L’amélioration, c’est-à-dire l’augmentation de la joie de la vie, suit la loi de la chute des corps : elle est inversement proportionnelle au carré de la distance de la mort. J’ai un grand désir d’écrire, d’écrire beaucoup, mais je ne fais encore rien. Il n’y a plus les anciens mobiles : la vanité et le lucre, qui me stimulaient et qui (je sais que vous êtes chatouilleux quand il s’agit de moi, mais je ne puis taire ce que je pense) ont produit des œuvres