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JALOUSIE

oui. » « Je comprends » avait cessé de me faire « bonne impression » parce que je savais que c’était presque mécanique et recouvrait sous sa netteté apparente beaucoup de vague et de bêtise. « — À quelle heure serez-vous revenu ? » « — J’ai pas pour bien longtemps », disait le lift qui poussant à l’extrême la règle édictée par Bélise d’éviter la récidive du pas avec le ne, se contentait toujours d’une seule négative. « Je peux très bien y aller. Justement les sorties ont été supprimées ce tantôt parce qu’il y avait un salon de vingt couverts pour le déjeuner. Et c’était mon tour de sortir le tantôt. C’est bien juste si je sors un peu ce soir. Je prends n’avec moi mon vélo. Comme cela je ferai vite. » Et une heure après il arrivait en me disant : « — Monsieur a bien attendu, mais cette demoiselle vient n’avec moi. Elle est en bas. » « — Ah ! merci, le concierge ne sera pas fâché contre moi. » « — M. Paul ? Il sait seulement pas où je suis été. Même le chef de la porte n’a rien à dire. » Mais une fois où je lui avais dit : « — Il faut absolument que vous la rameniez », il me dit en souriant : « — Vous savez, je l’ai pas trouvée. Elle n’est pas là. Et j’ai pas pu rester plus longtemps ; j’avais peur d’être comme mon collègue qui a été envoyé de l’hôtel (car le lift qui disait rentrer pour une profession où on entre pour la première fois « je voudrais bien rentrer dans les postes », par compensation ou pour adoucir la chose s’il s’était agi de lui, ou l’insinuer plus doucereusement et perfidement s’il s’agissait d’un autre, supprimant l’r et disait : « Je sais qu’il a été envoyé. » Ce n’était pas par méchanceté qu’il souriait, mais à cause de sa timidité. Il croyait diminuer l’importance de sa faute en la prenant en plaisanterie. De même s’il m’avait dit : « Vous savez, je ne l’ai pas trouvée », ce n’est pas qu’il crût qu’en effet je le