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Page:Les Œuvres libres, numéro 5, 1921.djvu/98

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JALOUSIE

Il me faisait de plus une politesse facile, Mme de Surgis-le-Duc étant assez mal vue.

Malheureusement, à peine étions-nous assis dans une baie sans dégagements, que Mme de Saint-Euverte, but des quolibets du baron, vint à passer. Elle, peut-être pour dissimuler, ou dédaigner ouvertement les mauvais sentiments qu’elle inspirait à M. de Charlus et surtout qu’elle était intime avec une dame qui causait si familièrement avec lui, dit un bonjour dédaigneusement amical à la célèbre beauté, laquelle lui répondit tout en regardant du coin de l’œil M. de Charlus par un impertinent sourire. Mais la baie était si étroite que Mme de Saint-Euverte quand elle voulut, derrière nous, continuer de quêter ses invités du lendemain, se trouva prise et ne put facilement se dégager, moment précieux dont M. de Charlus, désireux de faire briller sa verve insolente aux yeux de la mère des deux jeunes gens se garda bien de ne pas profiter. Une niaise question que je lui posai sans malice lui fournit l’occasion d’un triomphal couplet dont la pauvre de Saint-Euverte, quasi immobilisée derrière nous, ne pouvait guère perdre un mot. « — Croyez-vous que cet impertinent jeune homme, dit-il en me désignant à Mme de Surgis, vient de me demander, sans le moindre souci qu’on doit avoir de cacher ces sortes de besoins, si j’allais chez Mme de Saint-Euverte, c’est-à-dire, je pense, si j’avais la colique. Je tâcherais en tout cas de m’en soulager ailleurs que chez une personne qui, si j’ai bonne mémoire, célébrait son centenaire quand je commençai à aller dans le monde, c’est-à-dire pas chez elle. Et pourtant qui plus qu’elle serait intéressante à entendre. Que de souvenirs historiques, vus et vécus du temps du premier empire et de la restauration, que d’histoires intimes aussi qui n’avaient certainement rien de « saint », mais devaient être très vertes,