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CONTES ARABES.

« N’est-il pas vrai que la reine a grand tort de ne pas aimer un prince aussi aimable que le nôtre ? » « Assurément, répondit la seconde. Pour moi, je n’y comprends rien, et je ne sais pourquoi elle sort toutes les nuits, et le laisse seul. Est-ce qu’il ne s’en aperçoit pas ? » « Hé comment voudrois-tu qu’il s’en aperçût, reprit la première ? Elle mêle tous les soirs dans sa boisson un certain suc d’herbe qui le fait dormir toute la nuit d’un sommeil si profond, qu’elle a le temps d’aller où il lui plaît ; et à la pointe du jour, elle vient se recoucher auprès de lui ; alors elle le réveille, en lui passant sous le nez une certaine odeur. »

» Jugez, seigneur, de ma surprise à ce discours, et des sentimens qu’il m’inspira. Néanmoins, quelque émotion qu’il me pût causer, j’eus assez d’empire sur moi pour dissimuler : je fis semblant de m’éveiller, et de n’avoir rien entendu.

» La reine revint du bain ; nous soupâmes ensemble, et avant que de nous coucher, elle me présenta elle-même