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LES MILLE ET UNE NUITS,

d’autres. Lassée enfin de me frapper et de me poursuivre, et au désespoir de ne m’avoir pas assommé, comme elle en avoit envie, elle imagina un nouveau moyen de le faire : elle entr’ouvrit la porte de la rue, afin de m’y écraser au moment où je la passerois pour m’enfuir. Tout chien que j’étois, je me doutai de son pernicieux dessein ; et comme le danger présent donne souvent de l’esprit pour se conserver la vie, je pris si bien mon temps, en observant sa contenance ses mouvemens, que je trompai sa vigilance, et que je passai assez vîte pour me sauver la vie et éluder sa méchanceté : j’en fus quitte pour avoir le bout de la queue un peu foulé.

» La douleur que j’en ressentis ne laissa pas de me faire crier et aboyer en courant le long de la rue, ce qui fit sortir sur moi quelques chiens, dont je reçus des coups de dents. Pour éviter leurs poursuites, je me jetai dans la boutique d’un vendeur de têtes, de langues et de pieds de mouton cuits, où je me sauvai.