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Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 01.djvu/479

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l’aiguille, aussi bien qu’Antonio aurait pu le faire avec le pinceau, en sorte que nous ne devons pas avoir moins d’obligation au beau dessin de l’un qu’à l’étonnante patience de l’autre. Cet ouvrage demanda vingt-six années de travail ; les broderies furent exécutées au point serré qui, outre qu’il donne plus de durée, produit exactement l’effet d’une peinture au pinceau. Cette manière de broder est presque entièrement perdue aujourd’hui ; on a adopté un point plus large, qui est moins durable et moins agréable à l’œil.


 

Sandro BOTTICELLI
Peintre florentin, né en 1447, mort en 1510  ;

Dans le temps où vivait Laurent le Vieux de Médicis, et qui fut vraiment un siècle d’or pour les hommes de génie, florissait Alessandro, appelé Sandro[1], suivant notre usage, et surnommé Botticello, pour la raison que nous verrons plus loin. Il était fils de Mariano Filipepi, citoyen florentin, qui l’éleva avec soin et lui fit apprendre tout ce que l’on enseigne ordinairement aux enfants, avant de les mettre en apprentissage. Bien qu’il apprît facilement tout ce qu’il voulait, il était néanmoins toujours inquiet, et ne se contentait pas des leçons de lecture, d’écriture et d’arithmétique que lui donnait son maître d’école. En sorte que son père, fatigué de son imagination sans cesse en mouvement, le plaça, en désespoir de cause, chez un de ses compères, appelé Botticello, maître alors très compétent dans l’art de l’orfèvrerie. Il y avait à cette époque une très, grande familiarité et une fréquentation presque continuelle entre les orfèvres et les peintres, de sorte que Sandro, qui était très adroit de sa personne, et qui s’était consacré tout entier au dessin, se prit de passion pour la peinture et se disposa à s’y adonner. Il s’en ouvrit franchement à son père ; celui-ci, voyant l’inclination de son esprit, l’amena à Fra Filippo del Carmine, peintre très excellent de cette époque, et le mit auprès de lui à apprendre, comme Sandro lui-même le désirait. S’étant donc donné tout entier à cet art, il suivit et imita si exactement son maître, que Fra Filippo le prit en affection, et l’instruisit, de manière qu’il parvint rapidement à un degré de perfection auquel personne ne se serait jamais attendu.

  1. Né en 1447, d’après la déclaration de son père faite en 1480 ; son père était savetier.